Internet des objets et M2M

October 1, 2011

Les objets du quotidien rejoignent progressivement le vaste réseau internet, comme l’ont fait les êtres humains à la fin des années 90. Voitures, maisons, appareils électroménagers, panneaux publicitaires, systèmes de surveillance et machines s’interconnectent de plus en plus fréquemment à internet pour apporter de nouveaux services.

Cette généralisation de la connectivité appelée « internet des objets » est annoncée depuis plusieurs années et les possibilités offertes sont perçues comme l’une des évolutions les plus prometteuses d’internet. La finalité est de développer de nouveaux services, tant pour le grand public que dans le monde professionnel : sécurité, économies d’énergie et de temps, gains de productivité, etc. Mais qu’en est-il vraiment ? Quelles sont les applications et les solutions réellement opérationnelles aujourd’hui ? Comment se développe ce marché ?

J’ai travaillé ces trois dernières années en tant que directeur de programmes chez Sierra Wireless, un acteur majeur des solutions M2M (la communication Machine-to-Machine) et de l’internet des objets. Cette expérience m’a amené à mettre en œuvre et déployer de nombreux projets M2M et je présente ici une synthèse de mon retour d’expérience au travers de deux articles:

Première partie: La technique et les projets

  1. Internet des objets, M2M et applications
  2. Les architectures et les solutions
  3. Projet M2M : Facteurs clés de succès et écueils
Deuxième partie: les aspects business (article à paraître)
  1. Le marché et les modèles économiques
  2. Les évolutions en cours et le futur

1. Internet des objets, M2M et applications

L’internet des objets correspond à une vision ambitieuse et universelle d’interconnexion des objets du monde physique au sein du réseau internet. Ce nouveau domaine est supposé suivre les mêmes principes de développement que celui d’internet pour les humains : de plus en plus de connectés, des échanges ouverts et transverses de données et l’émergence de nouveaux services. Cette vision intégrée reste aujourd’hui très théorique et éloignée de la réalité des solutions et des projets existants.

La plupart des projets mis en œuvre actuellement consistent à répondre de manière pragmatique à des besoins très spécifiques et précis: compteurs électriques intelligents, santé à distance, gestion automatisée de bâtiments, vidéo surveillance, gestion à distance de panneaux solaires, géo-localisation de véhicules, transmission de données de fonctionnement de machines industrielles, remontée d’informations environnementales (pollution, météo, etc.). On parle dans ce cas d’applications verticales et les solutions mises en œuvre sont pragmatiques et ciblées sur le besoin.

Ces solutions interconnectent des objets physiques au réseau internet, mais de façon autonome et isolée les unes des autres. Cette approche verticale est privilégiée principalement parce que les besoins et les usages n’existent pas encore pour des solutions horizontales. Les solutions et les standards techniques ne sont d’ailleurs pas non plus matures. Les projets et le marché se concentrent donc aujourd’hui et depuis plusieurs années sur des applications de communication « Machine to Machine » (M2M), à distinguer de l’internet des objets.

Mon expérience dans le secteur M2M m’a amené à participer à la réalisation et au déploiement de solutions très diversifiées dont voici quelques exemples:

2. Les architectures et les solutions

Architecture fonctionnelle

Une solution M2M est une chaine intégrant différents systèmes techniques entre eux, depuis les équipements de terrain, jusqu’aux applications centrales destinées aux utilisateurs métier.

Sur le plan fonctionnel, les solutions M2M sont basées sur des architectures relativement génériques et reproductibles. Un travail de standardisation des architectures M2M est d’ailleurs en cours de définition par l’ETSI (European Telecommunication Standards Institute). Un des objectifs de l’ETSI est de permettre le développement de l’internet des objets via les principes d’interopérabilité et d’intégration horizontale évoqués plus haut. Le diagramme ci-dessous présente une vue synthétique de l’architecture M2M définie par l’ETSI.

Architecture Fonctionnelle M2M (ETSI)

Cette architecture fonctionnelle correspond à la plupart des solutions M2M concrètes que j’ai rencontrées. Nous retrouvons la même chaine d’intégration avec des composants logiques, des principes de communication et des services techniques comparables.

Les principaux composants de l’architecture sont brièvement présentés dans les paragraphes qui suivent.

Devices

Le but d’une solution M2M est de connecter des équipements de terrain au réseau afin de transmettre des données et/ou de recevoir des commandes. Ces équipements peuvent être des capteurs effectuant des mesures (énergie, température, humidité, présence), des actionneurs (ouverture de porte, démarrage d’appareil électrique) ou encore des systèmes plus évolués tels que des automates programmables pilotant des machines.

Gateway

L’interconnexion des équipements au réseau internet est mise en œuvre par des interfaces entre les équipements et une passerelle de communication (ou modem). Lorsque plusieurs équipements utilisent le même modem, il peut être nécessaire de mettre en place un concentrateur établissant une interface avec chaque équipement et le modem. Certaines passerelles évoluées intègrent des interfaces multiples et des fonctions de concentrateur, par exemple via la gestion d’un réseau local (Ethernet, wifi, Zigbee, X10, etc.).

Réseau de communication

Dans les solutions M2M, les échanges de données entre le modem et le système central passent généralement par le réseau cellulaire (GPRS, Edge, 3G) d’un opérateur mobile. Certaines solutions peuvent utiliser un canal de communication filaire. Par exemple en domotique, la liaison primaire à internet utilise le boitier ADSL de la maison. Le réseau cellulaire peut alors constituer une liaison de secours en cas de rupture de la liaison primaire.

Infrastructure de services

L’infrastructure de services fournit des fonctionnalités utiles pour le développement d’applications métier au travers d’interface de programmation (API). Cela comprend en particulier les services génériques d’accès au réseau et l’implémentation de protocoles d’échange de données. L’infrastructure de service est généralement partagée par plusieurs applications métier.

Ce composant d’architecture peut être mis à disposition par un fournisseur (éditeur ou prestataire de services hébergés) ou bien il peut être implémenté de manière spécifique pour répondre directement aux besoins de l’application métier.

Application métier

L’application métier met en oeuvre les fonctionnalités utiles aux utilisateurs finaux. Il peut s’agir d’utilisateurs professionnels (superviseur de systèmes distants) ou grand public (domotique, e-santé, etc.).

Ci-dessous une synthése des composants mis en oeuvre dans les solutions M2M (vue de type “product breakdown structure”). Cliquer sur le diagramme pour l’agrandir.

M2M Solution - Product Breackdown Structure

M2M Solution - Product Breakdown Structure

3. Projets M2M: facteurs clés de succès et écueils

Les projets M2M sont particulièrement complexes sur le plan technique, en raison notamment de la chaîne d’intégration qui implique une grande variété de technologies: modules électroniques, systèmes et logiciels embarqués, réseaux sans fil, opérateurs télécom, protocoles de communication hétérogènes (souvent propriétaires), système central de collecte des données et de gestion à distance, etc.

Pour réussir un projet M2M de bout en bout, il est donc essentiel de s’appuyer à la fois sur des équipes de spécialistes expérimentés dans chaque domaine ainsi que sur des experts de l’intégration globale et de la gestion du système. Il est en particulier indispensable de porter une grande attention aux études amont:

  • Cadrage précis des besoins et des contraintes (métier, techniques et économiques).
  • Architecture: Etude de différentes solutions techniques et fonctionnelles, sélection des composants et des fournisseurs (matériel, opérateur réseau, logiciels, plate-forme de services, intégrateur).
  • Prototypage: Dans la plupart des cas, la première étape consiste à mettre en oeuvre un prototype afin de démontrer la faisabilité et de d’identifier le plus tôt possible les points clés (fiabilité du matériel et des échanges réseau, coûts de communication, performances, etc.)

D’une façon générale, sur chaque projet, les aspects qui s’avèrent les plus importants concernent d’abord fiabilité du système de bout en bout – De nombreuses solutions M2M fonctionnent mal et ne remplissent pas correctement le service attendu faute de fiabilité. Au-delà, la sécurité, les performances et la gestion du système global constituent des points clés. Voici quelques idées permettant de mieux maîtriser ces questions:

  • Simplifier les architectures au maximum (coté embarqué et coté serveur) – L’empilement des couches et la “sur-sophistication technique” (over-engineering) engendrent des effets exactement contraires aux attentes
  • S’appuyer sur des standards techniques et des solutions ouvertes, si possible open source
  • Privilégier les mises en oeuvre par approches itératives et par l’expérimentation
  • Anticiper les problèmes RF avec un spécialiste (en particulier les problèmes d’interactions électromagnétiques au sein de systèmes matériels intégrés)
  • Anticiper et gérer la mise en réseau de la solution et les modèles de sécurité associés (réseau opérateurs, réseau de l’entreprise, VPN, NAT, etc.)

Les écueils et fausses bonnes idées:

  • Vouloir tout gérer au sein d’une plate-forme intégrée et supposée universelle : syndrome de l’usine à gaz coûteuse et impossible à maintenir – Si une plate-forme de services est utilisée, elle doit se limiter aux fonctions essentielles : broker de message, sécurité, interface de programmation (API) et optionnellement le stockage des données. Les autres fonctions peuvent être déléguées, y compris le “device management” (la supervision et la mise à jour du gateway de communication).
  • Attendre d’un système M2M des services et des performances équivalents aux application client-serveur classiques (i.e.: échange synchrone et temps-réel) – Cette attente est illusoire dans le cadre de communication “over the air” (OTA), notamment en raison des performances, de la fiabilité et du coûts des communications sans fil
  • Se baser entièrement sur l’architecture propriétaire d’un seul fournisseur intégrant une approche “tout en un”. Le phénomène de “boites noires” engendre des problèmes de dépendance technique et commerciale, les solutions s’avèrent par ailleurs souvent confidentielles et l’évolutivité, le service et le support sont limités aux seules capacités du fournisseur. Les coûts à long terme d’une telle approche sont défavorables

Le prochain article traitera des questions commerciales, des modèles économiques du M2M ainsi que des évolutions en cours et futures.

Open Leadership

June 12, 2010

“Be Open, Be Transparent, Be Authentic” are the new management mantras suggested by Charlene Li in her latest book: “Open Leadership: How Social Technology Can Transform the Way You Lead”.

Social Technologies make it easy today for everyone to publish and share feedbacks and opinions on “everything”, especially when it’s about products, services or companies. These possibilities bring both new opportunities and new risks for the business.
New opportunities lies in the easiness for users to find solutions, collaborate and get support from each other. For some successful innovative consumer products, it is even not rare to see the natural development of communities of enthusiasts that create blogs, knowledge bases and generate passionate discussions on the Internet.
New risks arise when a negative user experiences ends up on popular web platform such as You Tube and ruins months of investments and efforts (see the United breaks guitars case).
Based on this new business situation, Charlene Li explains that the best way to manage customers and employees relationships today is to release control and be more open on both information sharing and decision making.
The book is organized in three parts: (1) The upside of giving up control, (2) Crafting your open strategy, (3) Open leadership: Redefining relationships.
I’ll try to summarize below my “open, transparent an authentic” opinion 😉 through some key ideas developed in the book.
  • New problem solving approaches: Today, different innovative tools and methods are available for sharing information and solving problems. Among them,  crawdsourcing is mentioned as a very promising new model. Today, it allows to outsource simple tasks, such as graphical design creation. In the future, Charelene Li predicts that crawdsourcing will be used to solve more complex projects. I link up this idea with Jacques Attali’s vision which predicts that future businesses will be developed around new forms of  transient organizations, involving groups of people that team up for the specific circumstance of a project to deliver a product or service in a limited period of time. Attali establishes a parallel between these future business organizations and the organization model in a circus: short-lived organizations which aggregates talented & passionate professionals for the time of a show.
  • The whole book explores new management models: An interesting description is provided on the Cisco management approach,  based on a distributed organization model, involving numerous councils and boards with significant power, budget and autonomy of decisions. The process followed to change the company’s culture from individual competition to collaborative work has required eight years of efforts, starting from the top management team. John Chambers (the CEO) has cloned his decision making process across the organization, duplicating and scaling at the same time the power of the company.
  • Collaborative leaders: Most managers have built their success on individual achievements since thier childhood. Education rarely focus on the development of collaborative ways of thinking. The awarness of the benefits of collaboration and team work usually comes far later in a career. Developing a true collaborative mindset requires an important personal effort and some maturity, but it is the most valuable way of making great progress in today’s business environment.
  • The Open management contradiction: The section about democratic and self-managing business organization presents a model where the management seems to release control  on projects delivery and is less involved on operational issues and decisions. A few examples are given, including Meetup.com which is mentioned as an organization that let each individual software developer to decide what features should be  implemented in a self organized way. Such an approach could question the consistency of the final product, its match with the buiness and the overall efficiency of the work. Meetup is a free social web site – could such an approach be applied to design and manufature a new car? Managing is difficult in many ways, but its a duty for the benefits of all. Giving up on managing issues is a temptation for some managers that I have seen several times in my career path. Charlene develops a full section about the contradictory nature of openess, based on her experience on the USS Nimitz supercarrier where openess on non classified information is combined with strong control and rules when it comes to decision making.
  • The scope is “web centric”: The power of the web is emphasized, however, it seems to me that the power of nuisance of internet communities mainly affects big B2C players (Service providers, product manufacturer) or fancy/highly visible innovative startups that base their communication on internet buzz. B2B firms and a majority of SMB are probably less concerned about the internet noise and the need to develop a presence on new social medias.
  • Back to business basics: A company which fails to deliver quality products or services in a repetitive manner only jeopardise its future and its survival – Internet might only accelerate the trend. Focusing obsessively on quality and customer satisfaction is a basic of business. Being open and humble towards customers is probably a natural consequence  of this first objective, even though it is not so much common. Social technologies provide a great new channel for B2C actors to connect with customer, gather feedback and improve the business execution.
In practice:
  • A large part of the book is dedicated to the deployment of an open leadership approach within an organization, with a lot of advices and tools to use from the initial audit to the practical implementation.
  • What I keep in mind : Open leadership is about communication, relationship and management practices, both from an internal and an external standpoint. The single message that I would keep from this book, is the idea that conservative and protective behavior are often counter productive in the current environment. Open approaches may be challenging and risky, but they are a bet to make for high potential companies, involving responsible values and focusing on innovation, efficiency and outcome.

Open Leadership cover

About Charlene Li: I have met Charlene several years ago, when she was VP and principal analyst at Forrester. I have presented her a new startup project (Camino) that she has considered and analysed in a very open, curious and positive way. Unfortunately, I couldn’t afford the Forrester consulting offer and the contact has vanished, but the open nature of the discussion remains attached to her name. Another positive side effect of being open. Charlene has founded the Altimeter Group in 2008.

The purpose of this blog is to share analysis and experience feedback in the field of innovation and entrepreneurship.

Since 2008, my activities in the software and Internet domains have expanded to new areas: hardware devices, mobile computing, wireless communication and the Internet of Things. These new innovative fields are opening up new business opportunities and new development models involving multiple technologies and multiple partners on an international scale.

The content of this blog switches to English in order to be accessible to international readers and business actors. Below is the list of previous articles in French (the links send the articles to Google translate for an automatic translation). The original French articles are still accessible from the right panel.

    Smart object

    Cartographie business

    April 30, 2008

    Le diagramme qui suit est une représentation des activités dans le secteur de l’informatique et des nouvelles technologies. La vue arborescente permet de décomposer les différents marchés existants afin de les étudier : dynamisme, acteurs, opportunités, etc.

    L’analyse de l’environnement sous la forme d’un graphe me semble correspondre à une approche humaine naturelle et intuitive. Notre propre parcours ne correspond-t-il pas à un cheminement particulier dans un graphe comportant une multitude de possibilités?

    Le graphe a été réalisé à l’aide d’un outil de Mind Mapping open source : FreeMind. Cliquer sur l’image pour l’agrandir.

    Le web sémantique vise à développer une couche sémantique au-dessus du contenu diffusé sur internet afin d’offrir de nouveaux services et un accès aux données plus pertinent pour les utilisateurs finaux.

    Bien que la vision date d’une dizaine d’années (Tim Berners-Lee, 1998), le sujet connaît actuellement un fort engouement en raison du potentiel qu’il fait espérer. Les communautés de chercheurs et de capitaux risqueurs se retrouvent en première ligne pour explorer les possibilités de ce qui pourrait être la prochaine génération du web (certains évoquent le Web 3).

    De nombreux documents de qualité expliquent les principes du web sémantique, les technologies et les standards disponibles. Une approche générale et critique me semble bien abordée par les articles suivants:

    The Semantic Web in 6 minutes
    Semantic Web: What Is The Killer App?
    Semantic Web: Difficulties with the Classic Approach
    Top-Down: A New Approach to the Semantic Web

    Dans ce contexte, il s’avère intéressant d’examiner et de comprendre les développements en cours. Une rencontre sur ce thème s’est tenue à Londres les 16 et 17 février, sous la forme d’un BarCamp: SemanticCamp. La suite propose une synthèse de ce que je retiens de cette rencontre.

    1. Des expérimentations de laboratoire

    Les travaux présentés sont en grande partie des expérimentations techniques issues d’universités ou d’organismes de recherche. Les projets types sont des prototypes développés par des thésards en vue de démontrer le fonctionnement d’un élément de technologie “sémantique” : requètage, modélisation, etc.

    2. Des premières applications peu abouties

    Les techniques du web semantique (RDF, Sparql, micro-formats, etc.) commencent à être intégrées sur certaines plate-formes web innovantes (Joost, Freebase, Twine, Jamendo, Zemanta, etc.). Ces cas d’utilisations semblent néanmoins surtout de nature expérimentale ou “préparatoire” et ils ne semblent pas encore apporter de véritable rupture dans les fonctions ou dans les usages. De l’avis général, il manque toujours une application démontrant les bénéfices du web sémantique (une “killer App”).

    3. Des limites conceptuelles et techniques

    Le web sémantique s’appuie sur des concepts relativement complexes et abstraits.  Les limites suivantes sont souvent pointées:

    • Les possibilités de raisonnements (inférences) sont peu crédibles et n’aboutiront probablement pas avant longtemps.
    • Certaines notions centrales du web sémantique, telles que l’identification et l’assertion, comportent des dimensions ambigues ou subjectives qui altèrent les possibilités envisagées.
    • Il n’y a pas de solution simple pour rendre le web actuel sémantique, notamment en raison du problème de l’annotation (manuelle ou automatique)

    4. Un potentiel considérable

    Au travers de cet environnement toujours expérimental et incertain, il semble néanmoins poindre un vrai potentiel d’applications nouvelles à forte valeur ajoutée.

    Ce potentiel me semble notamment pouvoir résider dans les possibilités de requètage sur des sources de données distribuées.

    Par ailleurs, le concept de “Semantic Desktop” est susceptible de renouveler profondément les possibilités du poste utilisateur. Celui-ci pourrait à la fois accéder et parcourir de manière beaucoup plus pertinente les données du web. Le poste utilisateur peut devenir en outre une source de données à part entière dans le réseau global. Une source à la fois ouverte et requêtable sur les ressources explicitement autorisées par leur propriétaire.

    Dans ces conditions, il est possible d’imaginer une ouverture du web et des usages encore plus étendus que ceux que nous connaissons aujourd’hui. Une sorte de peer to peer intelligent et permanent sur les ressources numériques produites ou consommées par chaque utilisateur.

    Le marché des logiciels a connu d’énormes évolutions ces dernières années. Celles-ci ont entrainé une profonde transformation du modèle économique du secteur, traditionnellement basé sur la vente de licences.

    Pour tout nouvel entrant sur ce marché, la question du modèle économique se pose donc de manière critique, pour déterminer comment générer des revenus et développer une activité rentable et pérenne.

    1. Caractéristiques du marché

    1.1 Le marché des entreprises

    Le marché actuel des éditeurs de solutions professionnelles est le résultat d’un processus de concentration qui a abouti à la domination de quelques éditeurs majeurs (CA de plusieurs milliards de dollars par an) : Microsoft, Oracle, IBM, SAP, Computer Associate, HP, Adobe, BEA, SAS, etc. La France compte deux modèles de réussite dans le secteur : Dassault Systèmes et Business Objects (racheté par SAP en 2007).

    En complément de ces acteurs de premier plan, un grand nombre d’éditeurs secondaires s’est développé sur des niches de marchés, en proposant des solutions spécialisées sur des créneaux peu ou pas occupés par les grands éditeurs.

    Editeur majeurs ou secondaires, tous ces acteurs reposent aujourd’hui principalement sur un modèle économique traditionnel, basé sur la vente de licences de logiciels et la maintenance annuelle associée.

    En parallèle des éditeurs traditionnels, le marché des logiciels libres se développe fortement, avec un modèle de revenu reposant essenciellement sur la vente de prestations de services et de support autour du produit gratuit (ou presque). Les sociétés RedHat, MySQL AB et Alfresco sont représentatives de ce marché.

    L’autre tendance actuelle est à la diffusion de solutions professionnelles sous la forme de services hébergés (à distance) et accessibles en ligne, selon le modèle SAAS (Software as a Service). La société la plus représentative de cette nouvelle approche est salesforce.com, une solution de gestion de la relation client (GRC). La plate-forme d’origine tend aujourd’hui à s’étendre pour devenir un hub d’applications professionnelles, extensibles et personnalisables.

    En résumé, le marché des entreprises est caractérisé aujourd’hui par les évolutions suivantes :

    • Une concentration de plus en plus importante des éditeurs
    • Une évolution vers la « commoditisation » et la gratuité des logiciels (solutions open source)
    • La vente de prestations de support et de services (en particulier autour des logiciels libres)
    • Le développement du modèle SAAS (Software as a Service)

    1.2 Le marché grand public

    Le marché des logiciels pour les particuliers est caractérisé par une grande variété de produits et de nombreux supports d’exécution, en particulier :

    • Les logiciels pour PC : Jeux, outils bureautique, utilitaires multimédia, …
    • Les jeux pour consoles (Sony, Microsoft, Nintendo)
    • Les sites et services en ligne : réseaux sociaux, agrégateurs, stockage, …
    • Les solutions de mobilité : téléphone, lecteurs mp3, PDA.

    Du point de vue des revenus générés par le modèle traditionnel (vente de licences), les types de produits les plus importants du marché sont les suivants :

    • Les jeux sur consoles : CA mondial estimé 30 milliards d’euros en 2007 (Source idate)
    • Les systèmes d’exploitation, principalement Windows et Mac OS (vendu lors de l’achat du matériel)
    • Les suites de bureautique et de traitement graphique : Microsoft Office (+50% en 2007), Adobe Creative Suite, Apple Final Cut Studio, …

    Le chiffre d’affaire d’autres solutions grand public tend en revanche à décroitre année après années, notamment les jeux pour PC (-3,6 %) et les outils de productivité (-17%) – Source MicrosoftWatch.

    Le marché des jeux sur mobile a également régressé de prés de 10% en 2007. Une croissance serait néanmoins envisagée d’ici 2009 (source Juniper Research).

    En parallèle de logiciels traditionnels, les plateformes et les services en ligne « grand public » se développent à grande vitesse. Le modèle économique est dans ce cas principalement basé sur les revenus publicitaires et, plus marginalement, sur des abonnements (cf. Stratégie des startups Web 2.0). A noter, le fort développement de certains jeux en ligne, dans un contexte un peu spécifique où le principe d’abonnement semble relativement bien accepté.

    D’une manière générale, le marché grand public apparait donc à la fois dynamique sur certains segments « fermés » (jeux sur consoles, systèmes d’exploitation, …) et en régression, effective ou potentielle, sur de nombreux autres domaines.

    La baisse de revenus semble en particulier la conséquence d’une tendance générale vers la gratuité engendrée par les logiciels libres, le piratage, les échanges peer to peer, etc.

    En d’autres termes, le consommateur aujourd’hui n’est plus prêt à payer les logiciels qu’il utilise, sauf s’il est contraint de le faire, notamment en raison de verrouillages techniques ou commerciaux imposés par une plate-forme.

    2. Quelles opportunités et quel modèle privilégier?

    L’état des lieux qui précède permet de faire les déductions suivantes :

    Le marché des entreprises est largement contrôlé par quelques acteurs dominants ne laissant sur leur secteur pratiquement aucune place à de nouveaux entrants. Seuls certains produits open source sont susceptibles aujourd’hui de concurrencer ces éditeurs sur certains domaines : systèmes d’exploitation, serveur d’application, bases de données, etc.

    En marge de ce marché, de nouvelles opportunités semblent pouvoir exister sur certaines niches, notamment au travers d’un modèle de diffusion innovant (Saas et abonnements). L’approche Saas a pour avantage de limiter les coûts de commercialisation (considérables dans le modèle traditionnel) et de faciliter le déploiement et l’exploitation des solutions.

    Sur le marché grand-public, une énorme dynamique est en route, avec l’apparition permanente d’innovations dans tous les domaines : divertissement, mobilité, réseaux sociaux, etc. Par ailleurs, grâce à la généralisation d’internet et à l’ouverture des technologies, l’accès au marché n’a jamais été aussi facile.

    Ce contexte pourrait donc paraitre a priori propice au développement de nouvelles opportunités. Cette idée doit cependant être nuancé, en particulier parce qu’il n’est plus possible aujourd’hui de vendre des logiciels aux particuliers (sauf exceptions). La situation par catégories de produits est la suivante :

    • Les logiciels traditionnels : Ce marché est occupé par quelques acteurs parvenant à vendre des licences grâce à des mécanismes inaccessibles aux nouveaux entrants (vente couplée à l’achat du matériel, plateformes verrouillées, etc.).
    • Les jeux pour consoles et PC : Le marché est relativement mature et structuré. Les investissements pour produire une nouveauté sont considérables et risqués (comparable à la production cinématographique).
    • Les plateformes web : Les modèles économiques Web 2.0 sont fragiles et incertains. Les leaders captent la majeure partie des revenus publicitaires, principale (voire unique) solution de monétisation. Les startups ont donc plus vocation à être rachetées qu’à gagner de l’argent (cf. Stratégie des startups Web 2.0).
    • Les solutions de mobilité : Marché émergeant dont l’évolution pourrait suivre celle des PC : Convergence vers un ou deux systèmes (Windows mobile, linux, …), diffusion gratuite des logiciels embarqués et accès gratuit aux services en ligne (modèle publicitaire).

    Dans ces conditions, reste-t-il de la place pour de nouveaux entrants dans le secteur du logiciel ?

    Partant de ce qui précède, les critères clés de réussite pourraient être les suivants :

    1. Cibler une niche de marché très précise et en croissance.
    2. Sur le marché grand public : Verrouiller le mode de diffusion (association logiciel-matériel, …) ou vendre/louer la solution à un acteur intermédiaire plutôt qu’aux utilisateurs finaux.
    3. Sur le marché professionnel : se baser sur le modèle Saas
    4. S’appuyer sur des partenaires installés pour accéder au marché (aux clients) : hub applicatif (Saas), prescription, etc.

    Dans le cadre de la recherche des meilleures pratiques pour la création de sociétés “web 2.0”, voici une courte étude sur la démarche des projets qui ont su se développer avec succès dans ce domaine.

    Identification des startups Web 2.0

    Le Web 2.0 est un « buzzword » qui connait des définitions nombreuses et controversées. Pour ce qui me concerne, je retiens les caractéristiques suivantes :

    • La génération de contenu par les utilisateurs (user generated content)
    • La notion de réseau social (professionnel et personnel)
    • L’élaboration collective des connaissances et leur partage sous une forme ouverte (wikis, blogs, …)
    • L’introduction, plus ou moins élaborée, de fonctions sémantiques (tagging, métadonnées, etc.)
    • La mise en œuvre de technologies offrant des progrès d’ergonomie (Ajax) et des possibilités d’interfaçages avec des services externes (mashup)

    Les solutions du marché les plus connues dotées de ces caractéristiques regroupent en particulier : les réseaux sociaux, les plateformes de partage de contenu utilisateur (blogs, photos, musique, vidéo, fichiers), les sites de partage des connaissances (wikis, social bookmarking) et différents outils et services en ligne (agrégateurs, web office, etc.).

    Le tableau ci-dessous présente un panorama des plateformes Web 2.0 les plus représentatives dans leur domaine.

    Type Acteurs (sociétés ou organismes)
    Réseaux sociaux MySpace, FaceBook, Friendster, Bebo, LinkedIn, Match.com. En France: Viadeo, Meetic
    Partage de contenu utilisateurs MySpace, YouTube, Last.fm, Flickr, Weebly, Tumblr, Blogger, Six Apart, WordPress, twitter. En France: DailyMotion, Skyblog, OverBlog, vpod.tv
    Partage des connaissances Wikipedia, Digg, del.icio.us
    Portail personnel et agrégateurs iGoogle, MyYahoo, Live.com. En france: NetVibes, Wikio
    Applications web et outils Zoho, ThinkFree, Google Apps, Mozy, Twine, SalesForces.com
    Tableau: Sociétés représentatives du “web 2.0”

    Le marché compte un grand nombre d’acteurs avec des profils très variés: de grandes sociétés profitables (Google, Yahoo, Microsoft), des startups à succès (FaceBook), de petites sociétés en devenir (Tumblr, Wikio) et enfin des organismes à but non lucratif (Wikipedia).
    Le succès de ces acteurs pourrait être mesuré selon des critères financiers, mais il l’est le plus souvent selon le potentiel de rentabilité future. Ce potentiel est notamment lié à la fréquentation et à la possibilité de monétiser les données collectées sur les utilisateurs.

    Modèles de revenus

    Les principaux modèles de revenus des entreprises Web 2.0 sont les suivants :

    La publicité en ligne

    La vocation d’un site web ou d’un service web grand public est d’obtenir une fréquentation importante afin de générer des revenus publicitaires. La publicité pourra être d’autant mieux valorisée (le CPM et le PPC sont des indicateurs) que le profil des utilisateurs sera connu pour permettre un ciblage le plus pertinent possible. La publicité en ligne peut prendre différentes formes, le système publicitaire AdWords de Google est aujourd’hui le plus répendu et le plus simple à mettre en oeuvre.

    Les marques blanches

    Certaines sociétés génèrent des revenus en développant une « marque blanche » conjointement à leur site public. Cette approche consiste à vendre la technologie ou le contenu de la plateforme, sans citer la marque ou l’origine de l’information.

    L’affiliation

    Technique consistant à diffuser le catalogue de produits d’un e-commerçant sur un site bénéficiant d’une fréquentation intéressante pour le commerçant.

    Les abonnements

    Abonnement des utilisateurs finaux à des services en ligne. Une approche fréquente consiste à permettre un accès gratuit aux fonction élémentaires du site et à proposer un abonnement pour accéder à des services avancés (services premium). Ce modèle fonctionne en particulier pour les services de rencontre en ligne (Match.com, Meetic), mais pratiquement plus pour les sites d’information ou de contenu.

    In fine, la principale source de revenus des site web 2.0 (non marchands) est constitué par la publicité en ligne. Il est néanmoins avéré qu’un grand nombre de sociétés ne parviennent pas à monétiser leur service et n’atteignent pas l’équilibre financier. Elles doivent leur existence et leur survie aux financements externes dont elles ont bénéficié.

    Conclusion

    La véritable stratégie des startups Web 2.0 apparaît donc plus basée sur la recherche d’une cession à un acteur important du marché que sur un objectif de rentabilité à court ou moyen terme. Cette approche rend la démarche entrepreneuriale très aléatoire, car elle implique pour l’entreprise une impossibilité de se développer avec ses ressources propres et une forte dépendance vis à vis de financements et d’acteurs externes.

    Il y a-t-il des exceptions à cette règle ? Autrement dit, existe-t-il des sociétés Web 2.0 rentables et indépendantes?
    A ma connaissance, les sociétés web 2.0 potentiellement rentables (Facebook, DailyMotion, …) semblent avoir toutes connu assez rapidement un ou plusieurs tours de financements importants, sans avoir véritablement fait la preuve de leur rentabilité. Ce modèle de développement apparait pratiquement comme une règle systématique pour ces sociétés.

    On peut en déduire, paradoxalement, que la stratégie des société web 2.0 n’est pas de chercher l’équilibre financier, mais de créer un potentiel de valeur (fréquentation, usage, buzz, …) en vue d’être racheté. La rentabilité viendra éventuellement plus tard, dans le contexte opérationnel d’un acteur majeur du marché : Google, Yahoo, Microsoft, News Corp., etc.

    Cet article vise à formaliser et à transmettre les enseignements que j’ai pu tirer lors de la création d’un projet “Web 2.0”, entre 2006 et 2007.

     

    Partant de cette expérience, je me suis fait une idée personnelle de la voie la plus directe et la plus efficace possible. Une voie plus économe en temps, en investissement et en rencontres. Une voie de construction pragmatique qui maximise les chances d’aboutir à un projet pertinent, réaliste et susceptible de rencontrer le marché.

     

    Cette voie, que je formaliserai dans un prochain article, est principalement déduite des enseignements suivants :

     

    1. L’idée est déterminante

    2. Oubliez “la voie royale”
    3. Devenez un expert du marché
    4. Réalisez un prototype le plus vite possible
    5. Faites challenger votre projet et ajustez en permanence
    6. Trouvez des associés et développez votre réseau

     

    Enseignement n°1: L’idée est déterminante
    Les idées novatrices de produits ou de services ne manquent pas. Nous sommes même nombreux à pouvoir imaginer des solutions à des besoins entrevus ou bien pour exploiter des innovations techniques.
    Cependant, la finalité d’une entreprise n’est pas simplement de développer une idée, mais de créer de la valeur et de gagner de l’argent.
    Cela peut sembler une évidence, mais l’engouement actuel pour le “Web 2.0” engendre une grande quantité de projets dont les chances de succés semblent a priori trés faibles sur le marché.
    Pour fonctionner, une idée doit a minima trouver un marché, avoir un avantage concurrentiel sur ce marché et enfin elle doit pouvoir développer un modèle économique crédible.
    L’idée initiale porte en elle-même le potentiel de réussite ou d’échec futur. C’est pourquoi il est essentiel, avant d’aller plus loin, de faire valider son idée pour vérifier ses chances de réussite.
    En première approche, la méthode la plus simple est de réaliser soi-même une analyse critique à partir de sa propre connaissance du marché (cf. Enseignement n°3 – “Devenez un expert du marché”).
    Il reste que rien ne vaut un ou plusieurs avis extérieurs “éclairés”. Présenter l’idée à des collègues compétents, à des professionnels du secteur ou a des investisseur permet de tester son idée et de voir si elle résiste au flot de critiques.
    Dans le secteur du web, il m’a semblé que peu de cabinet spécialisés étaient susceptibles d’apporter une véritable expertise, par exemple sous la forme d’études de marché. Les véritables professionnels du web semblent plutôt se trouver à l’intérieur même des startups ou dans les structures de capital risques.

     

     

    Enseignement n°2: Oubliez “la voie royale”

     

    La voie royale consiste, à partir d’une idée et d’une équipe de “cadors”, à lever en quelques semaines un premier financement et à créer une société. La structure peut alors se développer en quelque mois avec des moyens confortables et lancer une version beta pour tester le marché.

    Cette voie idéale est accessible uniquement si vous partez avec une équipe de personnalités reconnues et complémentaires. Idéalement avec un entrepreneur qui a déjà créé une startup à succès et qui bénéficie d’une forte notoriété dans le milieu (ils sont peu nombreux en France).

    Sans ces profils dans votre projet, les chances de parvenir à lever des fonds avec une simple idée et quelques inconnus sont très faibles.

    J’ai rencontré au début de ma démarche de nombreux acteurs du financement : plusieurs sociétés de capital risque, des business angels, des intermédiaires, etc. Tous m’ont amenés à cette même conclusion: Ils ont besoin de la validation et de la crédibilité d’un sponsor reconnu pour pouvoir avancer des fonds. Cela semble être une règle universelle du secteur qui s’applique de manière stricte en France, mais également aux Etats-Unis, sous une forme probablement plus ouverte.

     

    Tant que l’on ne renonce pas à la voie royale, on peut passer beaucoup de temps à préparer des présentations et des business plans, et à rencontrer les acteurs du financement. Bien que ces rencontres soient toujours instructives, elles ne font pas avancer votre projet. Par ailleurs le réseau de connaissance noué au fil de ces rencontre me semble relativement peu valorisable et pérenne. Les flux de personnes et de projets rencontrés par les financiers sont considérables et nous sommes tous amenés à filtrer et à oublier pour pouvoir nous focaliser sur les choses essentielles.

    Le renoncement à la voie royale permet de s’orienter vers une voie pragmatique, peut-être plus réaliste et constructive pour le projet. Une voie qui force aussi à être bon pour exister, car disposer d’un financement confortable permet éventuellement de se tromper de route, voire d’être médiocre (le temps de tout dépenser).

     

     

    Enseignement n°3: Devenez un expert du marché

     

    La quantité de projets et de startup ciblant le marché du web est considérable, énorme, gigantesque! Il semble en fait que toutes les idées et les possibilités imaginables sont systématiquement mises en œuvre et testées (voir le post ci-dessous sur le phénomène de criblage).

    Cette situation impose de connaitre parfaitement le marché et de s’informer sans relâche sur les innovations, les modèles économiques, les projets qui marchent et ceux qui échouent.

    La connaissance et la compréhension du marché permet de positionner son propre projet, d’identifier les acteurs (concurrents, clients, partenaires, etc.) et finalement d’évaluer la crédibilité d’une idée.

    Connaitre parfaitement le marché est un préalable qui permet également de gagner beaucoup de temps, en évitant d’investir en partant de zéro dans la conception de solutions que l’on croit être uniques. Encore une fois, la plupart des modèles qui marchent ont en réalité déjà été réalisés et testés par d’autres, sous des formes diverses. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de marge d’innovation. L’innovation est bien souvent le fruits de recompositions et d’approches originales, réutilisant des concepts et des technologies préexistants.

    Par ailleurs, la présence de concurrents sur un marché donné ne doit pas être un barrage pour se lancer à sa conquête. Là ou des business rentables existent, il peut y avoir de la place pour de nouveaux acteurs. A l’inverse, là où il n’y a pas de concurrents, il n’y a peut-être pas de marché…

    Comment devenir un expert du marché web 2.0? Ma méthode consiste à lire beaucoup et sur la durée: les blogs de référence, les sites web et la littérature business (française et étrangère), etc. Sur internet, une méthode efficace pour absorber une grande quantité d’information en un minimum de temps consiste à utiliser un agrégateur de contenu, par exemple iGoogle, Google Reader, NetVibes, etc.

    Par ailleurs, en principe, la participation à des conférences ou salons thématiques est également l’occasion d’avoir des retours d’expérience et de sentir les évolutions du marché. Ce peut être en outre un moyen plus ou moins efficace de développer un réseau (cf. enseignement n°6). Néanmoins, au début d’une démarche ces événements me semblent comporter un intérêt incertain. Le coût peut être rédhibitoire (ex. Le Web3 à 1000 € HT), la foule innombrable, et le ton peut facilement devenir convenu et empreint d’un optimisme naïf et forcé. L’intérêt est en revanche évident pour ceux qui sont déjà lancés et qui cherchent à étendre leur notoriété.

     

     

     

    Enseignement n°4: Réalisez un prototype le plus vite possible

     

    Si vous n’avez rien à montrer, vous n’avez pas de projet.

    Je me suis assez vite rendu compte de l’inutilité d’essayer de développer un projet à partir d’une présentation, aussi élaborée et visuelle soit-elle. De toute manière, une fois que l’on a éliminé l’approche de la “voie royale”, il faut bien se décider à avancer concrètement d’une manière ou d’une autre.

    Un prototype permet de matérialiser un projet, en passant de l’idée et du discours fumeux à un véritable produit grandeur nature, concret et utilisable.

    Le prototype a pour but d’être présenté afin de recueillir des avis critiques, d’évaluer la pertinence du produit et d’ajuster sa définition pour trouver la meilleure adéquation avec le marché.

    Dans un deuxième temps, le prototype servira de base à la réalisation d’une première version (alpha ou beta) à mettre en ligne. Sur le web, l’approche itérative et la réutilisation de composants sont parfaitement adaptés. Cela nécessite une approche méthodique et certaines connaissances techniques dés le départ pour pouvoir avancer à peu de frais. Je prévois de détailler cette démarche dans un prochain article.

    Le prototype peut donc devenir le support de toutes les réflexions, de toutes les spéculations et de l’élaboration même du projet, dans ses dimensions business et humaines au-delà de la technique. Je le vois comme une sorte de Meccano en construction et en déconstruction permanente.

    Le prototype permettra éventuellement de conclure à l’inadéquation du projet sur le marché et d’arrêter là la démarche. Idéalement, il permettra au fil des itérations de déterminer une voie possible et potentiellement porteuse.

     

     

    Enseignement n°5: Faites challenger votre projet et ajustez en permanence

     

    Le porteur de projet est tout sauf objectif et rationnel. L’essence même de la création repose sur le désir, le plaisir, l’imagination et le rêve. Les mécanismes mentaux à l’œuvre sont donc relativement peu en prise avec la raison, la réalité et les contraintes du monde.

    Il s’agit donc de contrebalancer ou de canaliser les idées du créateur en les confrontant à la l’avis et à la critique d’autrui.

    Plus un projet est challengé en amont par des profils variés (utilisateurs, experts marketing, business, techniques) plus il a des chances, au fil des ajustements successifs d’aboutir à quelque chose qui tienne la route.

    L’important est donc de trouver des interlocuteurs pertinents à qui présenter son projet. A ce stade, une mise en ligne du prototype (version alpha ou beta de la solution) est très utile pour pouvoir solliciter l’avis de personnes distantes.

    S’il s’agit d’un produit destiné au grand public, il me semble important de ne pas se limiter à la seule communauté des ‘geeks‘ et des technolophiles hyperactifs du net. Bien qu’intéressant, leur avis et leur comportement peut s’avérer très éloigné de celui des utilisateurs moyens.

    Cet aspect des choses me semble pouvoir expliquer le fait qu’un grand nombre des projets qui apparaissent et disparaissent sur le web sont peut-être fait par et pour les ‘geeks‘.

     

     

    Enseignement n°6: Trouvez des associés et développez votre réseau

     

    Dernier enseignement qui pourrait être placé en premier : rien ne peut être fait tout seul.

    La plupart des retours d’expérience le montrent, il est extrêmement rare qu’un projet monté par une seule personne devienne un succès significatif. Tous les concours d’aide à la création d’entreprise le rappellent dans leur dossier de candidature: Ycombinator, SeedCamp, Oseo Innovation, etc.

    La qualité de l’équipe fondatrice apparait comme l’un des critères majeurs de succès. Chez les investisseur, cela semble même être le premier critère de jugement, avant le produit et le modèle économique. Ils doivent certainement se dire qu’avec une bonne équipe, l’entreprise sera toujours capable in fine de s’adapter à n’importe quel marché pour gagner de l’argent.

    Toujours est-il que la constitution d’une bonne équipe est peut être le challenge le plus difficile qui attend un porteur de projet.

    Pour ma part, c’est ici qu’en est aujourd’hui ma propre démarche et si je trouve une méthode efficace, je ne manquerai pas de la partager sur ces pages. En attendant, n’hésitez pas à me contacter pour en savoir plus sur mon projet. Je recherche en priorité des experts marketing et business…

    Retour sur l’idée que le web 2.0 est dans un processus autorégulé d’exploration systématique de ses propres possibilités.

    Le foisonnement actuel de projets et de startups me fait penser au processus de criblage moléculaire mis en oeuvre dans la recherche pharmaceutique. Le criblage moléculaire (High-throughput screening) permet de découvrir les molécules susceptibles de devenir les médicaments de demain. La technique consiste a effectuer des tests à grande échelle en essayant un très grand nombre de molécules différentes sur une cible biologique. Lorsque qu’une molécule montre une activité particulière, elle est sélectionnée (on parle de ‘hit’) pour passer à l’étape suivante du processus de sélection. De nombreux tests sont ensuite menés (notamment des tests cliniques) pour éventuellement aboutir après plusieurs années de recherche à la mise sur le marché d’un nouveau médicament. Le processus aura donc sélectionné une molécule particulière parmi des dizaines de milliers de possibilités proposées en amont.

    Les startups du web sont comme des molécules agissant sur une cible biologique : le marché. Celles qui montrent une activité particulière passent à l’étape suivante (un premier tour de financement) et ainsi de suite jusqu’à l’aboutissement éventuel d’une entreprise de premier plan (Google, MySpace, eBay, etc.).

    Que vont devenir les réseaux sociaux dans les prochaines années? Ces plateformes vont-elles continuer à se développer pour devenir rentables et pérennes? Au-delà de leur énorme succés actuel, ces nouveaux business semblent pourtant porteurs de nombreuses faiblesses, en particulier :

    • Les réseaux sociaux ne reposent sur aucune innovation technologique propre et brevetable. La copie et le clonage sont possibles et en pratique, ils se produisent
    • Les services offerts se différentient de moins en moins les uns des autres et il y a une convergence fonctionnelle vers ce qui marche
    • La monétisation des plateformes amène à de plus en plus d’intrusions dans la vie privée des utilisateurs qui engendre des dégradations d’image et des réactions de rejets
    • Le succès actuel semble beaucoup lié à des phénomènes de mode et de curiosité, avec des utilisateurs zappeurs à la recherche de nouveautés et de liberté
    • Le succès d’un réseau peut contribuer à le rendre moins attractif voire répulsif – Un ado qui retrouve ses parents sur Facebook à toutes les raisons d’aller voir ailleurs

    Partant de là, que peut-il advenir ? Les leader en s’adossant à de grands groupes vont probablement garantir leur pérennité, tout en se banalisant fortement. Ils perdront assez vite leur identité pour devenir de simples services en ligne, tel que peut l’être aujourd’hui la messagerie. Le marché va donc se « commoditiser », suivant un modèle qui touche l’ensemble du secteur IT : infrastructure, logiciels, portails d’information, etc.

    Par ailleurs, les utilisateurs ayant le plus souvent besoin de s’inscrire sur plusieurs réseau sociaux, on peut s’attendre à l’apparition d’outils permettant de gérer efficacement l’ensemble de son identité numérique : agrégateurs de réseaux, portails de services, etc. La conséquence sera pour les réseaux une perte importante de maitrise de la forme et du fond du contenu délivré. Cette perte de controle altèrera probablement à son tour la mise en œuvre des modèles économiques actuels, largement basés sur la publicité.

    En marge des services banalisés délivrés par quelques acteurs majeurs, l’exploration systématique des possibilités du web va se poursuivre à un rythme soutenu. La création de nouveaux services et leur diffusion est de plus en plus facilité par les technologies et des solutions à bas cout : programmation par composants, mashup, hébergement « low cost », etc. Par ailleurs, la création d’une startup devient de plus en plus facile, son financement requiert des montants de moins en moins élevés et le « time to market » est considérablement réduit. Voir l’excellent essai de Paul Graham sur le sujet.

    Ce foisonnement de startups offrant des services en ligne innovants participe à un immense système de sélection naturelle. Seuls les services apportant réellement une nouveauté pour répondre à un besoin du marché obtiennent une visibilité. Cette visibilité peut éventuellement devenir un succès, et enfin, se transformer en business pérenne si toutes les conditions sont réunies. La machine à sélectionner absorbe les quelques innovations pertinentes pour les intégrer le plus souvent dans l’offre des acteurs existants (aprés un rachat). La grande majorité des autres tentatives disparaissent plus ou moins rapidement. En marge, un nombre important de services en ligne peu ou pas rentables survivent plus ou moins fragilement, dans un environnement fortement concurrentiel.

    Les réseaux sociaux apparaissent donc aujourd’hui comme une offre dont la sélection est déjà assez largement avancée. Des acteurs secondaires ou de niche peuvent apparaitre au travers d’approche nouvelles, se distinguant en particulier par une identité forte. Il reste que la possibilité de monétiser et de pérenniser de telles plateformes apparait toujours comme un énorme challenge compte tenu de leurs faiblesses intrinsèques.

    [A suivre…]